L’impartialité joue un rôle clé au Moyen-Orient
Sandra Stewart, Communication SWISSINT, s’est entretenue avec le divisionnaire Patrick Gauchat, chef de mission ONUST au Moyen-Orient
19.07.2022 | Communication SWISSINT

Monsieur le divisionnaire, vous êtes le premier officier suisse à diriger une mission de l’ONU. Qu’est-ce que cela signifie pour la Suisse et l’Armée suisse ? Et pour l’ONU ?
C’est un honneur pour la Suisse d’avoir un général à la tête de l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST). Cela donne une grande visibilité à la Suisse au plus haut niveau de l’ONU ainsi que dans les cinq pays liés au mandat de l’ONUST, à savoir Israël, la Syrie, le Liban, l’Égypte et la Jordanie. La région est sensible sur le plan politique et le chef de mission doit travailler avec le tact et la diplomatie qui caractérisent les citoyens suisses. Ce choix souligne également l’engagement de notre pays en faveur de la paix dans le monde, précisément en cette année où la Suisse aspire à obtenir un siège au Conseil de sécurité de l’ONU. En ce qui concerne l’Armée suisse, cela témoigne du respect et de la confiance de l’ONU dans les compétences et la formation de haut niveau que notre armée offre à ses membres. Pour l’ONU et les pays hôtes, la nationalité suisse apporte une valeur ajoutée sous la forme de son identité d’État membre neutre, impartial et non aligné. L’importance de cette impartialité se voit dans le fait qu’Israël, la Syrie et le Liban m’ont directement demandé de faire preuve de neutralité dans le travail de l’UNTSO, en particulier en ce qui concerne l’observation et le rapport sur les incidents militaires et les violations présumées.
Quelles sont vos tâches?
En tant que chef de mission, je suis responsable de l’ensemble des activités opérationnelles et administratives de l’ONUST, ainsi que de la gouvernance, de la gestion et des ressources de la mission. Les exigences sont l’efficacité et l’efficience dans l’exécution du mandat à l’intérieur du cadre défini et des capacités approuvées par les États membres. Concernant le rôle politique et de liaison, je tiens régulièrement des discussions à haut niveau avec les cinq parties des accords de trêve. Celles-ci sont cruciales pour assurer des relations de confiance et une communication solide avec les parties, ainsi qu’avec les acteurs internationaux et de l’ONU, y compris les pays contributeurs. Pour ce qui est de la composante militaire, je veille à ce que les observateurs militaires de l’ONUST s’acquittent des tâches de surveillance opérationnelle qui leur ont été confiées de manière idoine. Il s’agit là d’un élément clé afin de créer les conditions permettant au niveau politique de discuter d’une paix durable et à la population de vivre dans une sécurité relative.
Comment tirez-vous profit de votre vaste expérience des missions?
Le fait d’avoir servi en Corée, au Kosovo et au siège de l’ONU à New York, par exemple, m’a permis d’acquérir une compréhension et une expérience étendues pour travailler dans un environnement politico-militaire de haut niveau. Je le vois également comme un cadre de référence pour développer de nouvelles idées de mesures d’augmentation de la confiance. Au cours de mes deux missions au sein de l’ONUST, j’ai beaucoup appris sur l’histoire et la géographie, ainsi que sur les différentes cultures et religions au Moyen-Orient. Cela m’a permis de me faire une idée précise de l’étendue des tâches de l’UNTSO et de l’étroite coopération nécessaire avec ses partenaires régionaux. Par conséquent, j’ai pu lancer de nouvelles initiatives et maintenir l’intégrité de la mission dès le début.
Quels sont les changements dans l’environnement de la mission?
Le plus évident est l’évolution du conflit syrien, qui entre maintenant dans sa 11e année. Ce conflit a entraîné des répercussions directes sur la sécurité et les opérations du Groupe d’observateurs au Golan. Ces conséquences sont maintenant surmontées par un processus progressif de retour complet du côté contrôlé par la Syrie, avec des protections, des constructions et des procédures supplémentaires. Les accords de normalisation conclus par Israël avec certains États du Golfe, les pourparlers sur le nucléaire iranien et le risque d’effondrement financier au Liban sont autant de nouveautés de ces trois dernières années.
Quels sont les principaux défis?
La durée de la mission, les rotations régulières parmi son personnel militaire et civil et les changements dans les relations entre les États de la région ont selon moi contribué à un rétrécissement de l’espace d’exécution du mandat par les parties sur les différents lieux stratégiques. Sur le plan tactique, cela se traduit par des restrictions de la liberté de mouvement et d’accès, ainsi que par des exigences administratives croissantes pour la circulation des personnes et du matériel dans les cinq pays. Les contraintes liées au COVID-19 nous ont également poussés à nous adapter et à une certaine forme de flexibilité.
Comment l’ONUST collabore-t-il avec la FNUOD et la FINUL ?
Nous entretenons une coopération harmonieuse, étroite et substantielle entre l’ONUST et la FINUL, ainsi qu’entre l’ONUST et la FNUOD. Il s’agit là d’une nécessité pour que les trois missions opèrent le plus efficacement possible et pour garantir que l’impact du rôle de chaque mission soit renforcé par l’autre. L’architecture politique et de maintien de la paix des Nations Unies est compliquée au Moyen-Orient, mais elle essaie de répondre aux besoins et de s’adapter aux demandes des parties du conflit. L’une de mes priorités est de travailler en étroite collaboration avec mes homologues de la FNUOD et de la FINUL, car une bonne coopération a logiquement des effets bénéfiques sur tous les services de la mission, tant civils que militaires.
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